Contexte
Dans le prolongement de la dynamique d’inventaire de la connaissance de la flore vasculaire régionale, le Conservatoire Botanique National de Bailleul s’est orienté vers un programme visant à assurer une connaissance fine et précise des taxons les plus menacés à l’échelle de la région Nord-Pas-de-Calais. Ce dispositif appelé Banque Stationnelle de la Flore, propose une synthèse sur la connaissance de ces espèces. En croisant les sources multiples, il est possible d’en préciser la localisation. Réparti entre l’ensemble des gestionnaires du territoire, le dispositif BSF vise donc à assurer un suivi dans le temps de ces stations hautement patrimoniales. La BSF constitue en cela un très bon outil de priorisation des dispositifs de recherche, de suivi, voire d’intervention.
C’est tout naturellement que le syndicat mixte du Parc naturel régional des Caps et Marais d’Opale a été associé à la démarche. La BSF fait depuis partie intégrante de son observatoire de la biodiversité.
Fiche mise à jour le ”20-11-2017” / Fiche révisée 8 fois
Méthodologie
Grâce à la mise en valeur des données compilées dans la base de données DIGITALE 2, les périmètres des stations d’espèces les plus menacées ont été définis. Les espèces considérées en danger critique (CR), en danger (EN) ou vulnérable (VU), les espèces protégées (notamment dans les périmètre N2000), les espèces sensibles aux modifications de leur habitat (fragilité des usages en place) ou sensibles au réchauffement climatique, constituent les principaux critères d’appartenance à la liste « BSF ».
Il est à noter également que la liste des espèces retenues tient compte des informations en lien avec leur préservation (par exemple si la station est présente en site géré ou non). Le CBNBL a donc remis au syndicat mixte du Parc une liste d’espèces relevant de la Banque Stationnelle de la Flore à l’échelle de son territoire.
Il s’étend sur 2 ans (2011-2012) et permet d’obtenir un bilan régional pour chaque espèce.
Bilan annuel des taxons recherchés
Bilan à mi-parcours
Bilan à l’issue de la Charte
Espèces concernées
Ache rampante (Apium repens)
Buplèvre en faux (Bupleurum falcatum L)
Céphalanthère à grande feuille (Cephalanthera longifolia)
Ciguë vireuse (Cicuta virosa)
Crassule mousse (Crassula tillaea)
Epipactis brun-rouge (Epipactis atrorubens)
Fragon, Petit houx (Ruscus aculeatus)
Gaillet chétif (Gallium debile)
Gesse de marais (Lathyrus palustris L.)
Jonc rude (Juncus squarrosus L.)
Laîche divisée (Carex divisa)
Liparis de Loesell (Liparis loeselii)
Menyanthe trèfle d’eau (Menyanthes trifoliata)
Millepertuis des montagnes (Hypericum montanum)
Montie des fontaines (Montia fontana)
Oenanthe fluviatile (Oenanthe fluviatilis)
Ophioglosse des Açores (Ophioglossum azoricum)
Orchis à odeur de musc (Herminium monorchis)
Orchis grenouille (Coeloglossum viride)
Pédiculaire des bois (Pedicularis sylvatica L.)
Petit pigamon (Thalictrum minus L. subsp. saxatile)
Potamot des Alpes (Potamogeton alpinus)
Prêle des bois (Equisetum sylvaticum L.)
Radiole faux lin (Radiola linoides)
Renoncule à feuilles d’Ophioglosse (Ranunculus ophioglossifolius)
Renouée de Ray (Polygonum oxyspermum susp. raii)
Sisymbre couché (Sisymbrium supinum)
Statice occidental (Limonium binervosum)
Stellaire des bois (s.l.) (Stellaria nemorum L.)
Lavande de mer (Limonium vulgare)
Laîche tomenteuse (Carex tomentosa)
Souchet long (Cyperus longus)
Bois joli (Daphne mezereum)
Gaillet de Fleurot (Galium fleurotii)
Milllepertuis androsème (Hypericum androsaemum)
Myriophylle à feuilles alternes (Myriophyllum alternifolium)
Sauge des prés (Salvia pratensis)
Spiranthe d’automne (Spiranthes spiralis)
Trèfle pied-d’oiseaux (Trifolium ornithopodioides)
Parmi ces 40 taxons, le syndicat mixte du Parc est en charge du suivi de 12 espèces pour les stations relevant des sites dont il a la gestion, sur certaines situées en propriétés privées, et pour terminer les stations dont l’opérateur est mal défini.Outre les stations identifiées pour le syndicat mixte du Parc, de nombreuses stations relèvent du périmètre de sites gérés par les partenaires gestionnaires du Parc (EDEN62, CEN) et font, à ce titre, également l’objet de suivis fins. L’idée de dresser une synthèse mutualisée à l’échelle du Parc est envisagée à la mi-charte.
- Cephalanthera longifolia (L.) Fritsch
- Cicuta virosa L.
- Epipactis atrorubens (Hoffmann) Besser
- Hypericum androsaemum L.
- Hypericum montanum L.
- Moenchia erecta (L.) P. Gaertn., B. Mey. et Scherb.
- Montia fontana L. subsp. amporitana Sennen
- Oenanthe fluviatilis (Bab.) Colem.
- Ophioglossum azoricum C. Presl
- Pedicularis sylvatica L.
- Radiola linoides Roth
- Spiranthes spiralis (L.) Chevall
En 2015, opportunité s’est présentée par ailleurs de suivre quelques taxons complémentaires comme la Crassule mous
Résultats
Sur les 12 espèces mentionnées, 9 ont été vérifiées en 2015.
Espèces non revues
Les stations de Samer pour Cephalanthera longifolia et de Setques pour Epipactis atrorubens n’ont pu être vérifiées en 2015. Ces espèces comptent toutefois des stations sur site gérés qui ont peut-être été relevées cette année par les gestionnaires concernés.
Bien que prospecté, les recherches effectuées pour Oenanthe fluviatilis sont restés vaines. Les mentions les plus récentes datent désormais de 2003. L’espèce a vraisemblablement disparu. Toutefois, après consultation des acteurs locaux, des prospections périphériques pourraient être intéressantes. Il reste quelques potentialités de sites qui n’ont pas fait l’objet de prospection ces dernières années.
Espèces vérifiées en 2015
C’est le Millepertuis des montagnes (Hypericum montanum) qui connaît la situation la plus critique. Un seul pied a en effet pu être observé et pointé par GPS.
On notera en 2015 la mention dans la base de données « observado » de ce millepertuis dans la forêt de Guines. Cette observation n’est toutefois pas validée régionalement pour le moment ainsi que des mentions de 2011 en forêt de Boulogne.
Concernant les millepertuis, à l’occasion d’une sortie des contributeurs à l’atlas de la flore de Nord-Pas-de-Calais organisée par le CBNBL en forêt de Desvres, ont été retrouvées plusieurs nouvelles stations de Hypericum androsaemum.
Cette plante, bien connue de ce massif forestier, voit donc le nombre de stations connues s’accroître un peu cette année.
Le suivi de la cigüe vireuse effectué par le syndicat mixte du Parc s’est poursuivi en 2015. Ainsi, il a été dénombré 437 pieds cette année (500 en 2011 pour rappel); la population se trouve être donc stable. L’essentiel de la station semble se resserrer sur 3 secteurs. Il est néanmoins nécessaire de conserver un état de veille sur cette station unique en Nord-Pas-de-Calais. Urbanisation, traitements chimiques, travaux de curage sont autant de facteurs susceptibles de porter atteinte à l’état de la station. Un passage tri-annuel est envisagé afin de suivre finement la station.
Pour les autres stations, le suivi effectué sur celles-ci entre dans le compte de la veille annuelle réalisée sur « 30 » espèces sur la Réserve Naturelle Régionale du Pré Communal d’Ambleteuse. On compte parmi elles, l’Ophioglosse des Açores, la Radiole faux-lin, la Moenchie dréssée, la Montie du Portugal, ou encore la Pédiculaire des bois.
Concernant cette dernière, les stations existantes sont dans de bons états de conservation. Elles font en effet l’objet de mesures de gestion fines et soignées (fauche exportatrice manuelle).
On notera la vérification de cette espèce sur la propriété du Golf de Wimereux. Par ailleurs, il est fait état de nouvelles stations sur des sites partenaires (EDEN62, comm. pers.). Toutefois, la station de cette Pédiculaire n’a pu être vérifiée cette année dans le secteur de Nabringhen-Henneveux.
Les stations traditionnelles de l’Ophioglosse des Açores ont été contrôlés. L’une d’entre elles semble souffrir, malgré la fauche exportatrice annuelle, d’un certain atterissement et d’une progression de végétaux qui concurrencent cette petite fougère hautement patrimoniale. Des mesures (micro-décapages) sont en réflexion avec le CBNBL.
La station du château d’eau a sans doute été visitée trop tard cette année . Toujours est-il que la plante n’y a pas été revue en 2015. Une vigilance accrue s’impose donc pour Ophioglossum azoricum.
La Montie du Portugal fait l’objet d’un relevé annuel qui témoigne du maintien des principales stations. Des opérations ont été menées afin de recréer ça et là de petits suintements sur sable propices à son épanouissement. Par ailleurs, cette Montie a été exhaustivement recherchée sur le communal d’Ecault. Des graines de toutes les stations du site ont été expertisées par le CBNBL afin d’assurer l’identification de Montia fontana L. subsp. amporitana. Si ce taxon est majoritairement présent, les graines ont révélé la présence d’une station de la très proche Montie naine (Montia minor)
Concernant la Radiole faux-lin (Radiola linoides), après les stations décourvertes en 2014 (C.Farvacques, CBNBL) lors de l’actualisation de la cartographie des habitats par le CBNBL, de très belles stations ont été trouvées cette année 2015 sur le périmètre de l’ancien aérodrome. Ce pointage constitue probablement la station la plus intéréssante du site et figure d’ores et déjà dans le périmètre de la future extension souhaitée pour la RNR.
L’année 2015 aura donné par ailleurs lieu à une grosse mise à jour des données de Moenchie dréssée (Moenchia erecta), recherchée de manière exhaustive sur l’enmble du pré communal. Ce travail intéressant a permis de mieux préciser son écologie en vue d’affiner un peu plus encore l’actualisation de la connaissance. Il est à noter que quelques pieds relictuels ont été découverts dans les dunes arrière-littorales non loin du camping d’Ecault à Saint-Etienne-au-Mont.
Enfin, après la redécouverte du Spiranthe d’automne en 2013, le suivi de l’espèce se poursuit désormais d’année en année. 27 pieds ont été dénombrés en 2015, contre 24 en 2014, 22 en 2013, cela malgré les signes d’eutrophisation du secteur concerné.
Données complémentaires
Profitant de la réalisation du plan de gestion du communal d’Ecault à Saint-Etienne-au-Mont, l’année 2015 aura offert avec l’observation de la Crassule mousse une formidable découverte en un site proposé au classement de Réserve Naturelle Régionale. Il faut rappeler que cette petite plante dont la commune littorale abrite les seules stations régionales, n’était présente que sur une partie de camping. Sa localisation sur un site géré devrait en assurer la pérénité.
Il faut ajouter à cela des recherches portées sur l’Orchis musc Herminium monorchis. Plusieurs stations ont été confirmées à Verlincthun (G.Flohart, comm. pers.) ou encore Audrehem.
L’excellente nouvelle vient de la découverte d’une nouvelle et très belle station à Colembert chez un propriétaire ayant contractualisé un accompagnement dans le cadre de Natura 2000.
Interprétation
Si certaines découvertes sont réjouissantes, l’interprétation doit être toute relative. On ne peut en effet en déduire qu’il s’agisse fondamentalement d’expansions d’aires de ces espèces. Il peut en effet tout aussi bien s’agir de stations anciennement présentes qui n’étaient jusque là pas référencées.
Là où cette information est toutefois intéréssante est que cette amélioration de la connaissance permet une prise en compte accrue des espèces, qui plus est, lorsqu’elles sont en site gérés. Par ailleurs, cela permet d’abaisser légèrement le niveau de menace, dès lors que les stations se voient multipliées.
Les espoirs de conservation ne reposent en effet plus seulement sur des stations parfois uniques.
Enfin, les résultats de l’année 2015 permettent d’ores et déjà d’orienter les actions en 2016 et au-delà. Ils permettent de prioriser les recherches pour l’année à venir mais aussi d’envisager des mesures de conservation concrètes pour les stations de 2015 les plus menacées comme pour le Millepertuis des Montagnes.
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