Contexte
La chouette chevêche (Athena noctua) est une espèce emblématique du Parc naturel régional des Caps et Marais d’Opale. L’espèce est en déclin au niveau national et européen. En effet, sa population nationale est évaluée aujourd’hui à 11 000 – 30 000 couples contre 10 000 – 100 000 à la fin des années 70 (Genot et al., 2001) . La dégradation de son habitat suite à l’évolution de l’agriculture et l’artificialisation des milieux a entrainé une régression des surfaces de prairies, et un arrachage de haies anciennes propices pour sa reproduction. Avec l’Avesnois, le Parc naturel régional des Caps et Marais d’Opale revêt une responsabilité régionale envers la conservation de cet oiseau plutôt bocager. Ainsi, depuis le début des années 2000, elle fait l’objet d’un suivi particulier sur le territoire du Parc naturel régional. En 2009, la définition de points d’écoute sur l’ensemble du périmètre du Parc a permis de dresser un premier état des lieux de sa situation. Cette initiative a été reconduite et ajustée en 2012 avec 102 points d’écoutes puis 165 en 2013. Ainsi, l’inventaire de 2013 avait permis de prospecter 54 communes sur les 154 du Parc naturel en mobilisant 23 observateurs.
Fiche mise à jour le ”26-10-2017” / Fiche révisée 3 fois
Méthodologie
Le suivi de la chouette chevêche est bisannuel. Il est basé sur le protocole national de la LPO reposant sur une méthode simple de points d’écoutes avec système de repasse. Deux passages sont réalisés sur un même secteur, l’un en mars et le second en avril durant la période de reproduction pour optimiser les chances de contacter l’espèce.
Les mâles chanteurs répondant aux émissions sonores sont comptabilisés.
Ce suivi à l’avantage d’être accessible à de nombreux observateurs tout en restant compréhensible.
Le syndicat mixte du Parc assure l’animation d’un réseau de contributeurs ce qui permet une couverture remarquable sur l’ensemble de son territoire.
Résultats
En 2015, le suivi chevêche a fédéré 23 observateurs répartis sur 15 grands secteurs. Au total, 150 points d’écoute ont pu être suivis (165 en 2013) ce qui représente au total plus de 15 heures d’observation. Sur ces 150 points, 108 ont donné une réponse positive.
Sur les 15 secteurs suivis, 13 secteurs reprennent ceux suivis en 2013 ; 2 nouveaux secteurs proposés en 2009 ont pu être suivis cette année (Wismes et Wimereux-est). Aussi, 13 secteurs sont comparables entre 2013 et 2015 et 6 le sont entre les années 2012, 2013 et 2015.
L’année 2015 semble marquer une baisse du nombre de mâles chanteurs contactés lors du suivi avec des valeurs proches de 0,95 mâles chanteurs/points d’écoute en 2015 sur les 150 points suivis. . Rapportées aux 126 secteurs communs aux années 2015 et 2013, ces valeurs sont de 0,96 contre 1,12 mâle chanteur en moyenne par point d’écoute.
Les secteurs bocagers du cœur du Boulonnais présentent les régressions les plus marquées. Sur 18 point suivis, le secteur de la Capelle-les-Boulogne perd 8 mâles chanteurs.
Les secteurs de Crémarest et Wirwignes perdent 7 mâles chanteurs. Sur ces deux territoires, l’espèce reste présente cependant à des niveaux proches de la moyenne.
A l’image de 2013, c’est la vallée de la Hem qui présente les plus importantes densités de mâles chanteur. La perte d’un chanteur par rapport aux 34 comptabilisés en 2013 est pour l’heure tout à fait insignifiante.
Le secteur de Samer reste sur des niveaux quasi équivalents à 2013 (15 chanteurs en 2015, 14 en 2013), tout comme la région d’Eperlecques qui malgré de petites fluctuations interannuelles demeure une zone très attractive.
Sur le marais audomarois, les comptages de Serques et Ruminghem donnent des résultats semblables à 2013.
La vallée du Bléquin ou le secteur de Wismes accueillent encore quelques chevêches dans des habitats caractéristiques composés de prairies et vieux fruitiers. Les densités n’y sont cependant jamais importantes. Dès lors qu’on aborde les zones les plus cultivés situées sur les hauteurs de ces vallées, la chevêche se raréfie inévitablement.
Le bocage de la vallée du Wimereux entre Belle et Houllefort et Wimille reste un secteur d’accueil très intéressant. 15 chanteurs ont été inventoriés sur ces deux zones rassemblant 14 points d’écoute.
Enfin, le petit cœur bocager d’Audembert ne peut permettre une expression massive de la chevêche. Le seul contact de 2013 a été confirmé en 2015. Au-delà du village, la grande culture intensive exclut très probablement l’espèce qui trouve dans ce secteur ses densités les plus faibles sur les territoires inventoriés dans le cadre de ce suivi.
Interprétation
L’interprétation des résultats est sujette aux plus grandes précautions.
Il faut considérer dans un premier temps que ce suivi n’a de sens que s’il s’inscrit dans la durée. En effet, en 2015, même s’il semble se dessiner des tendances par rapport aux années précédentes, celles-ci seront à vérifier dans les années à venir. Certaines fluctuations brutales (27 chanteurs à Ruminghem en 2012 contre 6 en 2013 et 2015) suscitent en effet encore trop d’interrogations pour qu’on puisse tirer une information fiable et définitive de ces suivis.
Par ailleurs, certains secteurs sont sujets à des changements récurrents d’observateurs. Bien qu’un protocole standard soit respecté, la méconnaissance du terrain par de nouvelles équipes peut induire un biais non négligeable (positionnement précis du point d’écoute par exemple, portée du matériel d’émission sonore, distance de perception de l’observateur….).
Passé ces précautions, il sera question probablement dans un second temps de corréler de possibles fluctuations avec les bouleversements dans l’occupation des sols. Cela sera réalisable par l’interprétation de l’orthophotoplan qui est actualisé environ tous les 3 ans. Aujourd’hui, il est donc encore trop tôt pour que le suivi soit synchrone avec des données d’occupation du sol, le dernier orthophotoplan datant de 2012.
Dans cette attente, l’hypothèse de la raréfaction de la chevêche liée à la dégradation de son habitat semble corrélée d’ores et déjà par des observations in situ réalisés çà et là (secteur d’Hardinghen par exemple).